Tout meurt et tout devient poussière. C'est inéluctable. Personne ne peut aller contre cette destinée qui n'épargne personne. Pourquoi naît on quand notre fin est définie, quand le but de l'homme n'est qu'une fatalité? Pourquoi naître et développer cette conscience du caractère périssable de l'homme? Pour le sadisme, dit le pessimiste. Pour l'amour de la vie, répond le romantique. Pour passer les connaissances, ajoutes le scientifique. Pour rien, rien d'autre que vivre, répond l'idiot.


Who cares if one more light goes out
In the sky of a million stars?
It flickers, flickers.
Who cares when someone's time runs out
If a moment is all we are?
Or quicker, quicker.
Who cares if one more light goes out?
Well, I do.


Lorsque tu es tombée. Quelqu'un a toujours été là à te rattraper, essuyer tes larmes et frotter tes jambes écorchées. Papa. Un nom doux qui sonnait à tes oreilles comme une figure, plus qu'un être, un tout. Il était ton pilier et celui sur qui se pencher quand tu flanchais. Entre toute cette enfance douce, enfance presque trop facile, trop heureuse, tu regardais toujours cette figure, plus dure, plus froide en serrant ton doudou dans tes bras frêles et courts. Cette mère qui ne te regarde jamais et te laisse passer ton temps dans ta chambre. Tes grands yeux de fillettes ne voyaient pas cette tension entre les deux êtres de ton quotidien. Ta vie était celle d'une banale coréenne qui grandissait entourée de ses parents, comme si tout était normal.
Comme si tout était calme.

Mais l'ouragan ne prévient pas. L'ouragan ne frappe pas à la porte pour prévenir qu'il arrive. Il ravage et prend comme on prend un jouet aux mains d'un enfant. Cet ouragan a ravagé ta famille, a brisé tes rêves et t'as fait grandir. Cet ouragan a pour nom le divorce. Toujours en quête d'une réponse tu cherchais la vérité auprès de ces êtres qui t'avaient tant aimé. Tu supposais. Tu espérais. Mais ce concept abstrait d'être séparé était bien plus complexe qu'un simple partage. Il y avait des parts et des départs. Celui de ton père pour un appartement plus petit, plus exigu. Juger pour ce qu'il n'est pas. Juger par des gens extérieurs pour une vie intérieure il ne faisait pas le poids contre l'argument de la mère. Alors il restait impuissant contre ce jugement. Celui qui t'as éloigné de lui, t'empêchant de faire ta vie, de grandir dans le foyer le plus chaleureux.

Finalement  cette décision prise par des gens extérieurs avait brisé tout ce que tu connaissais. L'amour, la douceur, la chaleur. Finalement, c'était trop dur pour lui. Finalement les humains sont des êtres simples. Ils sont faibles et sensibles ce qui les rend vulnérables. Ton père avait été cette personne vulnérable où tout lui échappe.
Il paraît qu'il y a un monde plus doux, où tout le monde y est mieux, un monde où tout le monde serait heureux. C'était dans ce monde là qu'il était parti en te laissant dans le froid d'un foyer, à peine couvert par un amour maternelle.


Si bien des fois tu es tombée. Si bien des fois tu t'es demandé ce que tu allais faire. Bien des fois tu t'es relevée. Les pertes, les gains, plus rien ne comptait que cette envie dévorante d'être heureuse, de croquer cette pomme qui était la vie.
Rien n'avait plus d'importance que le bonheur des autres. T'effacer dans la profondeur de ce qui serait de l'altruisme. T'enfoncer dans une quête qui n'a jamais de fin. Une quête qui demande des sacrifices, une sincérité, et une bonne humeur à toutes épreuves.

Quand bien même la première claque atterrirait sur ta joue. Quand bien même des mots dépasseraient l'entendement commun. Quand bien même ce ton fut trop lourd et trop fort. Tu n'as jamais cessé d'aimer. Parce qu'il paraît que la vie ne sert à rien d'autre que la savourer. Profiter. Devenir maître pendant une infime partie de l'éternité. Tu es devenu ton propre maître.
Cette vie n'est pas celle rêvée des autres mais elle est la tienne. Cette mort qui est la tienne, tu l'accepteras. Tu lui tendras les bras lorsqu'enfin tu sauras que tu as fait ce que tu voulais. Ce n'est ni demain, ni dans un mois que tu joues ta vie mais bel et bien aujourd'hui.

L'amour a frappé à ta porte tu lui as ouvert. Tu étais seule, après cette décision de ta part de quitter ta mère, ou plutôt ton patron pour vivre de tes propres ailes. Tu étais seule depuis que tu savais que ta gentillesse était vue comme une faiblesse. Mais qui voudrait te blesser ? Cet amour qui frappe à la porte.
Des souvenirs, des moments partagés et finalement une chute glaciale et frappante. Tu n'étais pas la seule, tu n'avais jamais été la seule. Tu espérais que cette blague cesse, que ton amour propre revienne. Mais même après des années tu continuais de sentir sur ta personne une sorte de sentiment. Tu avais été salie. Trainée et jetée. Utilisée et jetée. La vie était cruelle et tu la caressais. Quand cesseras tu ?

Et puis la maladie. Le grand fléau de la condition humaine. Leur faiblesse face à tout. Face à toi même. Finalement ton corps s'était rebellé et t'avais amené son lot de problème. Une greffe. C'était ta solution, la plus radicale qui soit et indispensable à un certain moment. Tu ne manges pas, ne bois pas comme les autres. Tu ne vis pas comme les autres. Mais tu ne souris pas comme les autres. Alors ça t'allait. Tu acceptais. Peu importe combien c'est dur, tu souris. Parce que chaque moment de chaque "aujourd'hui" t'apporte la certitude que si "demain" n'arrive pas,  alors "aujourd'hui" aura été beau.